Tribune libre de Jean-Philippe Demont-Pierot, auteur de "Birmanie, un livre pour vivre*" relevée sur le groupe Facebook animé par Eric Delteil,
L'objectif ambitieux du groupe est de pouvoir diffuser 5000 exemplaires afin de générer 35.000 euros de ressources partagées entre Info Birmanie, association qui a besoin de fonds pour financer ses activités et la Clinique de Dr Maung, "magnifique projet, installée en Thailande près de la frontière birmane qui soigne chaque année plus de 100.000 réfugiés birmans (les soins y sont gratuits)"
"Cela pourrait ressembler à une chorégraphie bien rodée. Chaque fois que la junte birmane fait parler d’elle, jamais en bien, les manifestations de ceux ayant au cœur de leurs engagements la défense d’une certaine idée de la vie et du respect d’autrui se mêlent aux protestations officielles de nos représentants politiques qu’ils soient français, d’Europe ou d’ailleurs, sorte d’écho sonore et pourtant souvent bien hypocrite. En 18 mois, ce fut le cas pour la mal nommée « révolution » safran, on eût aimé que ce qualificatif soit juste, l’insupportable mépris des généraux pour les victimes de l’ouragan Nargis et les « procès » de l’automne dernier qui virent condamner à des peines dépassant les 60 années de prison de jeunes leaders ayant cru à des lendemains victorieux.
Dans la cohorte des vilipendeurs, il faut noter la déclaration de notre ministre des affaires étrangères, Bernard Kouchner. Participant cette semaine à France Inter à l’émission matinale de Nicolas Demorand, il répondit en substance à la question d’un auditeur concernant l’incarcération de Aung San Suu Kyi et de possibles mesures de rétorsion ou d’embargo économique « que la France faisait le maximum mais que s’agissant d’embargo cela n’avait aucun poids car les échanges économiques avec la Birmanie étaient quasiment inexistants » Bon nombre d’oreilles ont dû se tordre (les miennes en particulier) à l’écoute de ces propos car s’il est un pays ayant les moyens directs et immédiats pour faire rendre gorge aux généraux birmans, il s’agit bien du nôtre.
Quelques chiffres devraient être gravés en épitaphe pour chaque victime de la dictature. L’armée birmane, un budget annuel de l’ordre de 700 millions USD, les reversements à la junte, chaque année depuis 10 ans de Total, l’orgueil de notre industrie pétrolifère, aux alentours du milliard USD, soit 80% des gains tirés de l’exportation de biens par le pays. Coûts de l’investissement du gazoduc birman, un milliard USD déjà amorti. Une production de près de 6 milliards de mètre cubes de gaz par an, vendus à la Thaïlande et payés cash. Pour l’année 2008, bénéfice record pour Total de 14 milliards d’euros !
Chaque fois que le bon sens pousse à poser aux dirigeants de Total la question d’un retrait de ce pays ou l’arrêt de l’extraction du gaz, les réponses sont toujours les mêmes : un programme d’accompagnement socio-éducatif pour les régions traversées par le gazoduc et le fait qu’un retrait signifierait la reprise des installations par un opérateur concurrent.
"Cela pourrait ressembler à une chorégraphie bien rodée. Chaque fois que la junte birmane fait parler d’elle, jamais en bien, les manifestations de ceux ayant au cœur de leurs engagements la défense d’une certaine idée de la vie et du respect d’autrui se mêlent aux protestations officielles de nos représentants politiques qu’ils soient français, d’Europe ou d’ailleurs, sorte d’écho sonore et pourtant souvent bien hypocrite. En 18 mois, ce fut le cas pour la mal nommée « révolution » safran, on eût aimé que ce qualificatif soit juste, l’insupportable mépris des généraux pour les victimes de l’ouragan Nargis et les « procès » de l’automne dernier qui virent condamner à des peines dépassant les 60 années de prison de jeunes leaders ayant cru à des lendemains victorieux.
Dans la cohorte des vilipendeurs, il faut noter la déclaration de notre ministre des affaires étrangères, Bernard Kouchner. Participant cette semaine à France Inter à l’émission matinale de Nicolas Demorand, il répondit en substance à la question d’un auditeur concernant l’incarcération de Aung San Suu Kyi et de possibles mesures de rétorsion ou d’embargo économique « que la France faisait le maximum mais que s’agissant d’embargo cela n’avait aucun poids car les échanges économiques avec la Birmanie étaient quasiment inexistants » Bon nombre d’oreilles ont dû se tordre (les miennes en particulier) à l’écoute de ces propos car s’il est un pays ayant les moyens directs et immédiats pour faire rendre gorge aux généraux birmans, il s’agit bien du nôtre.
Quelques chiffres devraient être gravés en épitaphe pour chaque victime de la dictature. L’armée birmane, un budget annuel de l’ordre de 700 millions USD, les reversements à la junte, chaque année depuis 10 ans de Total, l’orgueil de notre industrie pétrolifère, aux alentours du milliard USD, soit 80% des gains tirés de l’exportation de biens par le pays. Coûts de l’investissement du gazoduc birman, un milliard USD déjà amorti. Une production de près de 6 milliards de mètre cubes de gaz par an, vendus à la Thaïlande et payés cash. Pour l’année 2008, bénéfice record pour Total de 14 milliards d’euros !
Chaque fois que le bon sens pousse à poser aux dirigeants de Total la question d’un retrait de ce pays ou l’arrêt de l’extraction du gaz, les réponses sont toujours les mêmes : un programme d’accompagnement socio-éducatif pour les régions traversées par le gazoduc et le fait qu’un retrait signifierait la reprise des installations par un opérateur concurrent.
Nonobstant le rapport commandé, chèrement payé par la compagnie visant à la dédouaner de toutes responsabilités pour quelques crimes locaux et établi il y a quelques années par Bernard Kouchner lorsque celui-ci devait payer ses factures non pas sur le budget de l’Etat en sa qualité de ministre mais comme prestataire spécialiste en droits de l’homme, ce programme visant à une retombée locale du gazoduc n’est qu’une poudre aux yeux, à peine un million USD en dix ans, visant surtout à calmer l’ire des populations locales après les exactions de travaux forcés au cours du chantier.
Le second point est plus pernicieux. La question n’est pas de savoir si un concurrent pourrait prendre la place de Total mais qui, dans l’industrie pétrolière actuelle, aurait à la fois l’expertise et la compétence suffisante, avec la volonté politique de le faire ? Pas grand-monde, si ce n’est personne, en tous cas pour une reprise rapide de l’exploitation. Il faut rappeler à ce sujet que la compagnie américaine Unocal s’était retirée du projet pour des raisons politiques. Un arrêt de l’exploitation signifierait un long stand-by, saignant à mort les finances de la junte et pour le moins, l’obligerait à négocier.
Si Total refuse à la communauté internationale l’exercice de son droit de retrait, c’est que ce gazoduc est très rentable et dès lors chaque euro de ses bénéfices est teinté de sang birman !
Que faire ? Manifester bien-sûr, cela porte un peu mais surtout agir sur le plan politique. Dans trois ans, les français devront choisir un nouveau président et renouveler l’assemblée nationale. On peut alors rêver qu’une nouvelle majorité aurait la volonté, par exemple, de nationaliser Total ce qui pourrait, entre autres, l’obliger à quitter la Birmanie".
JPDP
*Le livre (281 pages, éditions kirographaires) sorti en librairie en juin 2008 peut être commandé en ligne, paiement CB par paypal au prix de 20,50 euros, avec expédition gratuite sous 24 heures et livraison délais postaux. Il suffit de cliquer sur ce lien : L'auteur évoque son livre dans l'interview présenté en rubrique " Eléments publiés " et des infos (presse, commentaires, etc.) sont disponibles sur son blog -
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